C’est une phrase qu’on entend souvent, et qui est rentré dans nos consciences comme quelque chose d’admis et d’incontestable : « le mieux pour apprendre une langue c’est d’aller dans le pays où on la parle » Mon opinion est un peu plus modérée là dessus, car dans de nombreuses situations, ça ne se passe pas comme ça.
Quand j’entends ça, je vois surtout un prétexte pour ne pas apprendre une langue, comme si la seule façon d’apprendre une langue était d’aller dans le pays, c’est à dire que tout le reste ne sert presque à rien. On se dit qu’on attendra d’y être pour apprendre à parler, et finalement une fois là bas on ne sait rien et on a pas le courage d’essayer vraiment de parler.
C’est un prétexte à la passivité : comme si on allait apprendre par magie à parler juste parce qu’on est au bon endroit. Si on ne cherche pas activement à parler, il n’y aura presque pas de progrès.
C’est aussi totalement faux dans de nombreux cas. J’ai passé 15 jours en Grèce à voyager seul, il y a 3 ans, et je suis rentré sans savoir dire oui, non ou même bonjour en grec. Pourquoi ? Parce que je n’en avais pas envie et en plus pas besoin, l’anglais me suffisait. Si j’ai pu rester 15 jours sans avoir à parler la langue locale, j’aurais pu y rester un an en connaissant 10 phrases.
Lors de mon premier voyage en Russie l’année dernière j’ai rencontré un mec qui enseignait le français depuis un an en Russie et qui ne parlait pas mieux que moi, c’est à dire quelques mots par ci par là. J’ai une amie qui vient de passer 6 mois en Chine et qui ne se souvient pas comment on dit non en chinois. Chaque année je rencontre des étudiants Américains, Mexicains, Russes, Turcs qui rentrent chez eux sans savoir parler français. La plupart de leurs cours sont en anglais et, ne fréquentant que d’autres étudiants internationaux, l’anglais est favorisé au détriment de la langue locale.
Il est donc finalement très facile de se débrouiller sans parler la langue du pays dans lequel on vit, voilà pourquoi rester en Russie sans fréquenter des Russes qui parleront uniquement russe avec vous ne vous fera pas énormément progresser. Bien sûr, même si vous n’avez pas l’occasion de parler russe activement (en dehors des phrases basiques) c’est toujours une excellente idée d’aller en Russie ! 🙂
Même en ayant un niveau intermédiaire en russe, il est plus facile pour moi de parler en anglais avec des Russes, même si leur niveau est mauvais. Notre premier besoin à l’étranger est de se faire comprendre, et cela peut favoriser l’apprentissage d’une langue aussi bien que le défavoriser.
Si votre but est de parler russe en Russie, il faudra que vous fassiez des efforts. Même si vous êtes nul en anglais, le plus facile sera d’essayer de se faire comprendre dans un mauvais anglais que de chercher chaque mot de vocabulaire manquant dans votre dictionnaire, ou pire de vérifier vos déclinaisons.
Voilà pourquoi de nombreuses personnes apprenant le russe reviennent de Russie sans avoir pu pratiquer vraiment, un peu déçues. Au quotidien, vous chercherez à communiquer et pas à progresser, c’est à dire que la priorité sera de se comprendre, et ce n’est pas forcément en parlant russe. Si vous restez dans les lieux touristiques, il y a des chances qu’on puisse vous aider en anglais, et même si les russes parlent peu voire pas anglais pour la plupart, parler avec les mains ou en montrant des choses sur une carte pourra être plus efficace que de vous essayer au russe avec un niveau débutant. Il y a donc parfois une opposition entre le fait de parler pour communiquer ou de parler pour progresser.
De plus, pour certains jeunes russes, vous représentez une bonne occasion de pratiquer l’anglais (ou pire le français !) vous aurez besoin d’essayer de parler russe et de faire la conversation en russe le plus possible , face à quelqu’un qui préfèrerai pratiquer un peu son anglais ou son français, et ça nécessite un effort au début.
On est jamais « prêt » pour parler russe, je le redis, le plus tôt c’est le mieux. Faites une conversation basique avec un russe, en sortant, à l’hôtel ou lors d’une visite, forcez vous à tenter de parler avec des russes qui ne parlent pas anglais du tout, ils seront certainement vos meilleurs professeurs.
Personnellement ce qui m’a beaucoup fait progresser en russe, c’est de fréquenter des russes de mon âge qui parlaient un tout petit peu anglais, c’est à dire qu’ils connaissaient plus de vocabulaire en anglais que moi en russe. C’était facile de me lancer en russe car je savais que c’était un choix de langue qui était le plus efficace, et en même temps ils pouvaient me souffler le mot qui me manquait si je leur demandai en anglais. C’est aussi dans ces situations qu’on crée des liens sincères avec les gens et aussi qu’on a l’occasion de parler de sujets intéressants. Au bout d’une demi heure à se forcer à parler, peu importe votre niveau, on est entrainé dans la langue et on sent déjà de grands progrès.
L’intérêt est d’essayer d’atteindre un niveau de conversation de base assez bon pour que les russes pensent (peu importe si c’est vrai) qu’il est possible de vous parler en russe. Je vous conseille pour ça d’apprendre les phrases les plus utiles par cœur et de savoir vous présenter en quelques phrases, c’est un excellent moyen d’engager des conversations. Les russes sont toujours ravis de voir qu’un étranger apprend leur langue, et ils auront beaucoup de questions à vous poser. A vous de vous lancer !